Après le triomphe vidéoludique de Batman Arkham City, il y avait peu de chances que les aventures de notre Dark Knight préféré restent sans suite. Roulements de tambour, le phénomène Arkham est bel et bien de retour sur consoles de salon et PC ! Une suite qui n’en est pourtant pas une… En effet, l’heure est encore une fois aux préquelles en tous genres avec l’arrivée de Batman Arkham Origins. Situé quelques années avant les événements narrés dans le premier opus (Arkham Asylum), cet épisode a le mérite de proposer un scénario foisonnant qui, si l’on s’y intéresse de près, met en place les éléments clefs de la « mythologie » du chevalier noir. Des ennemis qui font leur première apparition et des rencontres violentes, voilà le programme. Mais que vaut réellement la galette une fois entre nos mains ?
Parce que l’homme chauve souris
En dépit du très mauvais jeu de mots qui vient de suivre, soyons d’emblée objectifs sur Batman Arkham Origins. Après le développement des deux premiers opus par les studios de Rocksteady, ce petit nouveau change clairement la donne puisque Warner Bros. Games Montréal a pris le relai. Dire qu’un changement de développeurs est un pari dangereux pour une franchise serait en deçà de la vérité. Il semble pourtant que dans le cas d’Origins l’esprit de la série n’a pas disparu. Pour commencer, le scénario, s’il n’a rien d’extraordinaire, s’inscrit plutôt bien dans une forme d’anticipation de ce qui attend Bruce Wayne au cours de son combat contre le crime. Installé en tant que justicier depuis deux ans, Batman est encore, lorsque l’histoire commence, une sorte de paria pour la police et nombreux sont ceux qui doutent réellement de son existence. La nuit du réveillon de Noël et une prime de 50 millions de dollars sur sa tête vont alors être les deux éléments déclencheurs d’une série d’événements. En effet, suite à ce contrat, les chasseurs de prime les plus chevronnés du monde vont se lancer à la poursuite du chevalier noir tandis que lui-même tentera d’arrêter Black Mask, criminel montant et commanditaire de nombreux meurtres. Dans les faits cela donne l’occasion au joueur de se plonger à nouveau dans l’univers unique d’Arkham: l’ambiance sonore, les doublages français, la qualité visuelle et la mise en scène des cinématiques sont tout simplement exceptionnels. Toujours gérées grâce à un système de progression, les compétences du chevalier noir sont débloquées au fur et à mesure, ce qui renforce le plaisir de jeu et donne une vraie teneur à l’aventure. Pourtant tout n’est pas parfait. Qui dit Batman, dit nécessairement gadgets et autres joyeusetés. À cet égard, Arkham Origins est aussi l’occasion pour tous les amateurs de sensations fortes de renouer avec un gameplay qui a fait le bonheur de tous. Batman, comme à l’accoutumée, dispose de toute une panoplie d’outils qui l’aident dans son combat contre le crime. Des batarangs à la batgriffe en passant par le brouilleur, tout y est ou presque, et au cours de l’aventure quelques nouveautés feront également leur apparition. Le système de combat, qui inclut la touche d’attaques et celle de contres, fait lui aussi un grand retour, de même que les QTE lors des combats de boss, chose qui reste discutable du point de vue du plaisir de jeu. Néanmoins, en ce qui concerne le cahier des charges, on peut donc affirmer que cet épisode s’appuie haut la main sur les excellentes bases de ses prédécesseurs.
Un gameplay ok, mais qu’en est-il des nouveautés ?
L’héritage est là, mais est-ce là une raison valable pour encenser ce nouveau titre ? La réponse n’est certainement pas simple, et il faut avant tout considérer le soft seul, sans regarder en arrière. Malgré quelques lourdeurs dans le scénario (Batman est obstiné, et le personnage d’Alfred le rappelle sans grande finesse) et des idées un peu trop réductrices en matière de morale, le scénario fait honneur au Dark Knight. Là où le bât blesse davantage, c’est dans la manière dont les différentes phases de jeu s’enchaînent. Riche au possible, la campagne solo comporte un défaut majeur : l’aspect répétitif de certaines situations. Bien entendu, la qualité du jeu n’est pas en remettre en cause, et le plaisir n’en est pas vraiment diminué. Pourtant, on pourrait réellement reprocher à Warner Bros.Games Montréal d’avoir voulu intégrer un trop grand nombre de personnages dans cet opus qui a tendance à partir un peu dans tous les sens. En effet, s’il reste toujours très excitant de jouer le jeu de l’infiltration (se cacher sous une grille pour surprendre les ennemis ou se suspendre pour les piéger en hauteur reste et restera jouissif), la galette manque clairement de rigueur : dans l’ensemble, les missions s’enchaînent souvent avec linéarité et se ressemblent. On se surprend alors à espérer qu’une cinématique ne vienne faire bouger un peu les choses. Les nouveautés, comme l’accélérateur de grappin, qui permet à Batman de se propulser en hauteur après s’être agrippé à un rebord, ne sont en définitive qu’un cache misère. Arkham Origins est long et dispose en outre d’un très grand nombre de quêtes annexes qui viennent se greffer sur la campagne principale. Pourtant, les situations se répètent un peu trop souvent, point qui reste tout de même dépendant de la sensibilité de chacun : le jeu est immersif mais ne se renouvelle pas beaucoup quand il s’agit de varier les situations. Un aspect négatif que l’on ne peut pas forcément reprocher à ce titre qui souffre de la comparaison avec ses aînés, mais reste un divertissement de qualité. On retrouvera ainsi les cartes de défis qui proposent aux joueurs de s’essayer au corps à corps ou bien de jouer les prédateurs en éliminant toute une escouade de criminels armés.
Un multi bien nécessaire ?
Au rang des nouveautés, Batman Arkham Origins s’est doté, assez curieusement il faut bien le dire, d’un multijoueur en ligne. N’y allons pas par quatre chemins : les habitués de la série risquent du coup de grincer des dents. En effet, dans l’unique mode de jeu proposé (pour lequel il n’y a que quatre maps…) les joueurs incarneront Batman ou Robin en tant que prédateurs. Le but sera de semer le désordre et de ralentir la progression des deux équipes qui se livrent bataille. Si le résultat n’est pas foncièrement déplaisant, il faut cependant observer qu’il comporte un revers de médaille des plus déplaisants. En effet, durant les différentes phases, les joueurs auront l’occasion d’incarner la bande du Joker ou de Bane. Autant dire que le résultat est pour le moins étrange : une sorte de TPS (tir à la troisième personne) maladroit et bâclé, qui n’apporte aucune sensation forte. Concrètement, ce online ne marquera pas beaucoup d’esprits et on peine à comprendre sa véritable utilité, d’autant que la durée de vie de la galette était déjà conséquente ! Certaines voies sont impénétrables semble-t-il…
Que dire à l’heure de rendre un verdict ? Beaucoup de choses. Pour commencer, Origins est un divertissement de très bonne facture. Riche, intelligent et dynamique, ce titre n’aurait finalement pas de torts s’il n’avait pas pour aînés deux véritables phénomènes vidéoludiques. Hélas, les choses étant ce qu’elles sont, la galette souffre de la comparaison avec Asylum et City. Elle s’inscrit fidèlement dans leur lignée, mais ne parvient pas à en retrouver toute la force. Plus embêtant encore, les nouveautés, que l’on attendait de pied ferme, ne sont pas suffisantes pour combler les lacunes. Enfin, le multijoueur est quant à lui une véritable déception, preuve qu’il n’est pas toujours aisé de mettre une licence à cette sauce : dans ce domaine, n’est pas Assassin’s Creed qui veut. En définitive Batman Arkham Origins est un bon jeu, mais attention à ne pas le comparer à ceux à qui il emboîte le pas !